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Le Cetia, pour une mode durable et circulaire

Réalisé par Fabrice Lundy et Dorothée Blonde

Photos LIONEL GUERICOLAS

Implantée à Hendaye, l’entreprise basque cherche à accélérer le développement de la filière de recyclage française et à modéliser l’industrie circulaire de demain.

Chloé Salmon Legagneur :  Directrice du Cetia

L’aventure Cetia commence, en 2017 à l’école Estia de Bidart, dans les Pyrénées-Atlantiques. Jean-Pierre Mocho, l’ancien président de la Fédération française du prêt-à-porter féminin, initie une chaire autour de cette question : « Comment l’innovation peut-elle accompagner l’industrie de la mode et du textile dans sa transition sociale, environnementale et économique ? » Le programme est alors financé par des marques de mode dont Petit Bateau, Eram ou Décathlon qui y voient la possibilité d’accélérer leur propre recherche et développement sur le recyclage. En 2019, quand le sujet de la circularité devient plus prégnant, il manque une étape clé pour développer une filière solide en Europe, celle de « la préparation à la matière au recyclage » ou comment déconstruire vêtements et chaussures en fin de vie, ou invendus, pour récupérer la partie textile réutilisable. Ces étapes, manuelles et coûteuses, étaient jusqu’alors un frein au développement de ce secteur à l’échelle industrielle.

Un incubateur au service du recyclage

Le Cetia, créé deux ans plus tard, va combler ce manque. Centre technologique, il met son savoir-faire à disposition de la filière. L’Estia, actionnaire de la plateforme d’innovation, apporte ses connaissances en robotique, automatisation, intelligence artificielle. Et le Centre européen des textiles innovants (Ceti) amène sa compétence sur la partie textile. Entrée à l’Estia pour accompagner les jeunes entreprises, Chloé Salmon Legagneur, la directrice du Cetia, est tout de suite séduite : « J’ai aimé l’idée de mettre plusieurs personnes autour d’une table pour essayer de coconstruire les sujets d’avenir. Je suis très animée par l’innovation collaborative afin d’imaginer le futur. » Cette plateforme d’innovation devient la première dédiée au tri et au démantèlement automatisés des articles textiles. L’activité du Cetia repose sur l’identification des articles, la composition des vêtements, leurs couleurs, afin de les diriger vers une solution industrielle dédiée. « Quel que soit le secteur d’activité, le développement durable aujourd’hui guide beaucoup l’innovation en Europe. » L’entreprise basque travaille sur différents programmes pour partie financés par l’éco-organisme Refashion : « Reshoes » sépare les tiges des semelles de chaussures à l’aide d’un bras mécanique, et « Reclothes » est un système automatisé de collecte et d’analyse des données sur les vêtements. « On est sur des sujets de filières, et les marques se mettent facilement autour de la table pour cofinancer ces problématiques. »

Augmenter la part du recyclé dans le fil

La création du Cetia est une opportunité importante pour l’industrie de la mode qui doit faire face aux futures contraintes législatives. L’UE va en effet imposer, entre 2025 et 2030, un pourcentage de matière recyclée dans tous les vêtements et chaussures mis sur le marché en Europe. « Aujourd’hui, l’accès à la matière recyclée est plus cher en raison d’un manque de quantité, puisqu’on n’a pas les technologies pour faire ça à grande échelle. Il n’y a pas de matière disponible », constate Chloé Salmon Legagneur. Le Cetia a été créé pour aller chercher les vêtements en fin de vie qui représentent un volume assez important. Il développe également des technologies pour augmenter la part de recyclé dans le fil, en la faisant passer de 10 à 20 %, jusqu’à 70 %. L’objectif est de permettre le recyclage et d’alimenter la production en circuit fermé, afin de réduire l’empreinte carbone d’un produit textile. Reste le problème de son coût. « Il faut que l’on développe les technologies à une échelle suffisamment importante pour que cela ne coûte que quelques centimes d’euros pour séparer des semelles et de refaire des semelles de chaussures. » Refashion pilote les collectes dans les points d’apports volontaires qui recueillent par an 200 000 tonnes de vêtements et de chaussures. L’État français a donné des objectifs plus importants à l’éco-organisme afin de répondre aux futures contraintes européennes. Il opère également une « écomodulation » en récompensant les marques qui mettront des produits plus durables sur le marché. Mais insiste la directrice du Cetia, « le modèle économique est à trouver. C’est pour cela qu’il faut continuer de développer les technologies qui permettront de faire ces opérations de manière rentable ».
« Quel que soit le secteur d’activité, le développement durable aujourd’hui guide beaucoup l’innovation en Europe. »
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