Catégories

PME

Groupe F, le feu sacré

Réalisé par Fabrice Lundy et Dorothée Blonde

Photos LIONEL GUERICOLAS

Trente ans après sa création, l’entreprise de pyrotechnie camarguaise est devenue une référence mondiale. Aux commandes, Christophe Berthonneau, un passionné de spectacles et de feu.

Christophe Berthonneau :  PDG Groupe F

Les jardins de Versailles, le Louvre Abu Dhabi, les 1 000 mètres de la Burj Khalifa à Dubaï : le Groupe F ne cesse d’illuminer la planète. Christophe Berthonneau a grandi dans le monde du spectacle. À 13 ans, il travaille à la régie d’un théâtre rue Mouffetard. Quelques années plus tard, il rejoint un ami en Camargue et participe à la création de performances, entrecoupées de missions d’intérim dans des aciéries de Fos où il découvre « avec une certaine extase la puissance du feu et des métaux ». Il décide alors d’étudier la maîtrise du feu sous toutes ses formes, et en 1992, il rejoint le jeune Groupe F fondé par des amis, près d’Arles. « Tout s’est enchaîné vite. »

Les drones et l’IA au service de l’émotion collective

« Tout seul, je n’existe pas. » Lorsqu’il parle du Groupe F, le directeur artistique décrit une équipe très fidèle de 70 collaborateurs de toutes nationalités, qu’il qualifie d’amis : « On s’est tout de suite mondialisé. » Aujourd’hui, 85 % de son activité se fait à l’international, principalement au Moyen-Orient. Innover en permanence, voilà ce qui anime Christophe Berthonneau. Si elle n’assure qu’une soixantaine de spectacles par an, préparés des années en avance et vendus l’unité quelques centaines de milliers d’euros, l’entreprise mise sur un cortège d’innovations : costumes ignifugés pour les jongleurs, tirs informatisés générateurs de flammes. Ceux-ci permettent de projeter du pétrole sous pression devant des électrodes dirigées à distance, pour donner naissance à des flammes modulables pouvant s’éteindre sur commande. L’embrasement à l’horizontale de la tour Eiffel pour l’an 2000 – une première – c’était lui. Sans oublier les drones, dont l’objectif est d’y réaliser la moitié de son activité d’ici à 2025. Le Covid fut en effet l’opportunité d’une révolution. Séduit par les spectacles de drones de Sky-Magic, les pionniers en la matière, le groupe décide d’investir dans ce domaine. Les feux d’artifice reliés à des drones permettent d’utiliser moins d’explosifs, et donc de réduire l’impact environnemental, pour une même durée de représentation. « Ce sont les spectacles du XXIe siècle. » Les yeux pleins de rêves, Christophe Berthonneau évoque justement son grand projet à Saadiyat, cette île artificielle d’Abu Dhabi. Avec 1 000 drones chaque soir, l’artificier rend hommage au génie des artistes en utilisant notamment le light painting, qui permet de reproduire un dessin grâce à des drones porteurs, une première mondiale. Vols de haute précision, satellite, intelligence artificielle, algorithme. « Il faut courir plus vite que les autres, en inventant et en créant, explique-t-il. On est d’ailleurs souvent copiés. »

Un groupe visionnaire reconnu par ses pairs

Le zélé du feu aspire à créer une expérience collective inédite tout en s’amusant et en s’émerveillant toujours un peu plus. « Nous, on fait du spectacle », c’est l’ADN du groupe camarguais. La valeur ajoutée de ses spectacles est la création artistique, truffée de codes, appuyée par des connaissances techniques, scénographiques, dramaturgiques. « Il suffit de contempler des trésors pour s’enrichir. » Le dirigeant passionné n’a jamais quitté la Camargue, sensible à la nature dans laquelle il a choisi de vivre. « On a cette espèce de schizophrénie, car on réalise des événements mondiaux avec de très grands feux d’artifice et en même temps nos spectacles ont toujours été fondés sur un rapport à la biodiversité, une relation entre les gens, une vision peace and love écolo. » Fort de ses trouvailles, Groupe F accumule les trophées. L’une des dernières, en novembre dernier : le « Thea Award of Outstanding Achievement » pour son « Feu Ô Lac » présenté à Genève, il y a un an avec des drones. Seule ombre au tableau : le leader évoque la fragilité du métier impacté par les coupes budgétaires, les événements géopolitiques qui peuvent réduire l’envie de réjouissance ou encore le réchauffement climatique générateur de sécheresse. Alors que les délais de mise en place des projets ne cessent de raccourcir, l’artificier aspire à ralentir la cadence. « Essayons de nous adapter à ce que la science nous dit. Le monde est rempli de belles choses, la nature des spectacles doit changer. » A-t-il de nouvelles innovations en tête pour 2024 ? « Oh que oui, et elles sont absolument confidentielles ! » On a hâte de les découvrir.
« Il faut courir plus vite que les autres, en inventant et en créant. On est d’ailleurs souvent copiés. »
Partager cet article
Partager cet article

Vous pouvez retrouver l'intégralité de cet article dans la revue :

ECO KEYS #6

Commander sur Fnac Commander sur Amazon Commander sur Cultura

Cet article est un extrait, vous pouvez commander la Revue Eco Keys pour le retrouver en intégralité.

Temps de lecture : 3 mins