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Et si vous investissiez dans un troupeau de vaches !

Réalisé par FABRICE LUNDY ET CAMILLE BOUR

Photos LIONEL GUERICOLAS

Placer son argent dans des animaux d’élevage: Entreprise et Patrimoine a remis au goût du jour une pratique médiévale.

SÉBASTIEN DUMAIS :  président d’Élevage et Patrimoine.

Élevage et Patrimoine à Dardilly près de Lyon est la première société de placement financier en cheptel bovin laitier français avec plus de 3 000 éleveurs partenaires depuis sa création et 30000 vaches: c’est le plus gros troupeau européen! Et c’est du sérieux puisque cette société de gestion est la seule à avoir été agréée l’an dernier par l’Autorité des marchés financiers avec un numéro en catégorie « biens divers » à l’instar du vin par exemple.

Si l’entreprise a une cinquantaine d’années, il faut remonter au Moyen Âge pour découvrir qu’au XIe siècle ceux qui avaient de l’argent pouvaient acheter des vaches pour diversifier leur patrimoine, et les mettre à disposition des éleveurs dans le besoin, avant d’en partager les fruits du lait et de la viande. C’est Napoléon Bonaparte qui dans la loi du 17 mars 1804, toujours en vigueur, définit le « bail à cheptel » comme un contrat par lequel « l’une des parties donne à l’autre un fonds de bétail pour le garder, le nourrir et le soigner, sous les conditions convenues entre elles ».

À l’origine d’Élevage et Patrimoine, il y a la société Gestel Locowtel, qui vient aider en 1972, en Isère, des éleveurs de la Ferme de Boulieu, la plus grosse exploitation de France avec 800 laitières. L’idée était de soulager avec un mode de financement alternatif, les exploitants qui avaient investi de grosses sommes, en vendant la moitié du troupeau à des investisseurs privés.

Un investissement dans l’économie réelle

En 1990, en raison d’une loi qui interdit l’appel public à l’épargne, l’entreprise doit se scinder en deux : Gestel devient ainsi la régie technique : c’est elle qui place le bétail mis en location et la structure Élevage et Patrimoine, la maison mère, est créée pour s’occuper de la gestion et représenter les investisseurs.
Son dirigeant est Sébastien Dumais, un ancien dirigeant de Fidelity National Information Services, une société américaine de services de paiement : « On est là pour placer son argent dans de l’économie réelle. Certes la finance c’est mon activité mais j’ai une grande affinité avec le monde agricole. »

Le principe est simple : la mise est de 1485€ pour acquérir une bête. Un certificat de propriété est remis, et si l’animal décède, un autre prend le relais. « On investit sur des élevages existants ou qui vont se créer avec de jeunes agriculteurs», explique passionnément le président de Gestel.

Plus de 2000 vaches supplémentaires arrivent chaque année. « On préconise le bio pour pousser dans un sens environnemental mais ça ne va pas sans mal, constate le dirigeant, car il y a une forte déperdition au moment de la conversion de conventionnel à bio. » L’entreprise lyonnaise veille bien à ce que le bien-être animal soit respecté avant de confier à la location les bêtes : « Dans le contrat, c’est d’ailleurs la première condition. »

Plusieurs formules sont proposées :
soit réinvestir le gain annuel dans de nouvelles têtes, soit toucher du cash.

Un outil de souveraineté

Une formule gagnant-gagnant. D’abord pour les exploitants, qui peuvent ainsi bénéficier d’outils plus performants et plus souples en complément de ceux des banques. Sébastien Dumais est très fier :
« Cela contribue au développement de l’agriculture française, grâce à la diversification des sources de financement. Oui c’est une solution d’avenir – un outil de souveraineté – même si cela représente moins de 1% du cheptel laitier. »

Ensuite pour les 1 200 investisseurs déjà séduits par le rendement annuel de 3,3 % en moyenne sur les dix dernières années et par la fiscalité douce qui permet d’amortir à hauteur de 10 % sa mise, en réduction de ses revenus. Séduits aussi peut-être par ce que le dirigeant qualifie « d’investissement à impact positif, responsable et solidaire. » Pour Sébastien Dumais, il n’y a pas photo et « les banques nous le disent : on ressemble beaucoup à des valeurs refuges. Un peu comme l’immobilier ».

Un placement attractif qui a, comme ailleurs, attiré des escrocs promettant monts et merveilles. Il y a quatre ans, une bande de malfaiteurs n’avait rien trouvé de mieux que de recopier les documents d’Entreprise et Patrimoine. L’AMF veille en lançant régulièrement des messages d’alerte.

La prochaine étape pour l’entreprise de Dardilly ? « Élargir aux vaches allaitantes, donc les vaches à viande et ensuite démocratiser notre solution financière pour séduire 100% des éleveurs français de bovins et un jour proposer nos solutions à l’échelle européenne », se plaît à rêver Sébastien Dumais.

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