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Des pièces en métal allant du micron au mètre

Réalisé par Fabrice Lundy et Maud Aigrain

Photos Lionel Guericolas

Sans cette ETI champenoise, pas ou peu de montres, de trains d’atterrissage, de pipelines dans le monde. Avec ses alliages, Lebronze alloys fait le régal des géants mondiaux de l’industrie.

ALEXANDRA DUMONT NUBERY :  directrice générale de Lebronze alloys

SpaceX fait partie de ses clients. Tout comme Airbus, Thalès, Bic, Schneider Electric ou LVMH. On trouve ses alliages de cuivre et de nickel dans tous les secteurs ou presque. Pourtant, Lebronze alloys, fondée en 1934 à Suippes, dans la Marne près de Reims, a bien failli disparaître.

Sa renaissance, elle la doit à Michel Dumont, un ancien consultant en stratégie, qui avait fondé avec son épouse leur cabinet de conseil. Ses clients étaient des PME et des ETI, parmi lesquelles Le Bronze Industriel. « En 2006, la société, détenue par un fonds d’investissement, était au bord de la faillite », rappelle Alexandra Dumont Nubery, la fille du couple, alors âgée de 16 ans. Elle cumule 40 millions d’euros de dette avec un résultat quasi nul. Pourtant, c’était un acteur clé de l’industrie, incontournable même pour certains secteurs ! Car déjà, on retrouve ses alliages dans le monde entier, dans les trains d’atterrissage d’un avion sur deux, dans plusieurs armées et une multitude de marques de voitures. « Mon père sent que le potentiel est considérable », poursuit-elle. Avec ses associés, il entre au capital. La famille Dumont en devient l’actionnaire principal.

Une poignée de porte antibactérienne

Cinq ans plus tard, à l’issue d’un redressement spectaculaire, l’entreprise est sur pied. L’équipe de direction va s’employer à la développer et la diversifier au-delà de ses terrains de jeux historiques que sont l’aéronautique, l’automobile et l’industrie pétrolière et gazière. À coups d’acquisitions – une vingtaine en dix ans –, le groupe change de dimension, et de nom, pour être rebaptisé « Lebronze alloys », plus international (ndlr : « alloys » signifie « alliages » en anglais). L’objectif était clair, explique celle qui a rejoint le groupe en 2013 et en a pris la direction générale, il y a deux ans : « Consolider un savoir-faire métallurgique en France et en Europe pour construire un leader mondial. »

Lebronze alloys et ses 800 collaborateurs développent aujourd’hui plus de 200 alliages. « Notre gamme de produits va d’un mètre de diamètre jusqu’à un millimètre, et nos clients peuvent encore les miniaturiser jusqu’au micron, notamment dans l’horlogerie de luxe », détaille fièrement Alexandra Dumont Nubery.
« Nous sommes parfois les seuls au monde à savoir faire certains alliages ! » Dans l’industrie pétrolière et gazière, ils servent ainsi aux équipements en milieu marin, le cuivre et le nickel ayant la propriété de repousser les micro-organismes qui menacent de se fixer sur les tubes.
Lebronze alloys fournit à la lunetterie des vis minuscules, dotées d’une résistance unique capable d’absorber des milliers de manipulations. Dans la santé avant même la crise du Covid, le groupe a inventé une poignée de porte antibactérienne pour lutter contre les maladies nosocomiales à l’hôpital. Le groupe présent sur une cinquantaine de secteurs de niche réalise parfois des parts de marché de 70%!

Des alliages plus « verts »

Trois ans après la pandémie mondiale, l’ETI a su se réorganiser pour relever la tête, en fermant cinq des treize sites et spécialiser ceux qui restent, car « notre valeur ajoutée, c’est notre savoir-faire d’exception ». Pari réussi : près de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires, dont 85% à l’international. Recentrée sur son cœur de métier, Lebronze alloys continue d’innover sur des marchés à très fort potentiel, comme les batteries électriques ou les énergies renouvelables. « La transition énergétique est l’une des tendances de fond sur lesquelles nous avons fait le choix de nous positionner très tôt », se félicite Alexandra Dumont Nubery.

Le groupe développe aussi des solutions « vertes », tels un alliage sans béryllium, une substance nocive ou des alliages sans plomb. « Plus généralement, nous nous employons à engager le moins de métal possible en amont. » La production d’un kilo d’alliage nécessite en effet deux kilos de métal. Dans son atelier d’upcycling, à Suippes, la moitié des déchets de fonderie sont réutilisés. « Le recyclage aussi nécessite beaucoup de recherche. Quand on recycle à froid, on consomme 50 fois moins d’énergie qu’à chaud. Et 200 fois moins que lorsqu’on extrait du métal d’une mine. » En cinq ans, le groupe a déjà réduit de 50 % ses émissions de CO2. « Dans ce mouvement, nous souhaitons être un moteur, pour tout notre écosystème », promet-elle.

« Lebronze alloys continue d’innover sur des marchés à très fort
potentiel (batteries électriques, énergies renouvelables). »

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