Nos trains, nos fusées, nos canalisations sont recouverts de peinture fabriquée par cette pépite lilloise qui brille dans plus de 70 pays. Mäder consacre 10 % de son chiffre d’affaires à la R&D en direction de produits toujours plus innovants et respectueux de l’environnement.
Corinne Molina nous reçoit à Villeneuve-d’Ascq au milieu de maquettes du nouveau TGV 20-20, de voitures, de super tankers. Normal, Mäder, qu’elle a fondé avec son mari Antonio Molina, le président, est l’un des géants mondiaux des peintures techniques à forte valeur ajoutée qu’on va retrouver sur des trains, des moteurs d’avion, des pipelines, des rétroviseurs de voiture, des bouchons de parfum, et même les propulseurs de la fusée Ariane 5…
Le siège de Mäder accueille depuis peu la R&D long-terme jusqu’alors basée à Mulhouse. « L’idée étant de se situer à côté du CNRS, des écoles et universités et d’EuraTechnologies, et de s’ancrer davantage avec la recherche dans les Hautsde-France », explique Corinne Molina.
Les 1 200 m2 et la vingtaine de chercheurs y sont répartis sur trois étages.
Il faut plusieurs années pour concevoir une peinture, huit ans par exemple pour celle du Leap, une nouvelle génération de turboréacteurs. Dans le ferroviaire, où les peintures durent trente ans, on est sur un long cycle et « cela conduit à apprendre la patience et ne jamais abandonner ».
Leader mondial pour la peinture des trains
L’histoire de Mäder débute en 1993 après la reprise à Marœuil dans le Pas-de-Calais de Corsain, spécialisée dans les peintures décoratives, et menacée alors de fermeture. Sa directrice fi nancière, qui avait démarré comme comptable, se bat avec certains salariés et le maire pour trouver des acheteurs « locaux ». Ce seront sa fille et son gendre : Corinne et Antoine Molina.
Aujourd’hui, l’entreprise lilloise qui a depuis pris le nom de Mäder est devenue un géant du secteur et est le seul à développer des peintures et composites, antifeu et antifumée pour le secteur ferroviaire dont il est le leader mondial. Pour cela, 10 % des 190 millions d’euros de chiffre d’affaires sont consacrés à la recherche et le développement.
Une peinture sans solvants
« La chimie, c’est la vie mais nous devons la transformer pour offrir une meilleure protection de la planète. » Dès 1993, ce fut le parti pris d’Antonio Molina : concevoir des peintures hydrodiluables, sans solvants. Il fut l’un des premiers à s’engager sur des produits sans styrène, notamment un vernis pour isolant qui recouvre les alternateurs électriques. « La réglementation, notamment Reach en Europe, est de plus en plus dure. Nous voulons faire d’une contrainte, une clé pour l’innovation », insiste-t-on au siège de Villeneuve-d’Ascq. Quand on lui demande quelle est la recette des peintures Mäder, Corinne Molina répond d’emblée : « La passion des équipes pour l’innovation basée sur la formulation de produits performants et respectueux de l’homme et de l’environnement. »
L’industrie française rayonne à l’export
L’une de ses dernières acquisitions dont elle parle avec émotion, c’est BS Coatings, spécialisée dans les revêtements et résines pour canalisations. Elle en est convaincue. « L’eau va devenir stratégique et il est crucial d’inventer des procédés pour l’économiser. » Elle est incollable sur le procédé qui permet de colmater les fuites sans déterrer les tuyaux, en une seule journée.
L’entreprise nordiste est très active à l’étranger avec neuf sites de production.
80 % des ventes se font à l’export. « Faire travailler des cultures différentes, travailler avec des Suisses, des Indiens ou encore des Turcs est une autre satisfaction », confie Corinne Molina.
L’une des grandes fiertés de celle qui est aussi ambassadrice de la French Fab de BPI Excellence est sa Légion d’honneur remise en 2010 par la ministre de l’Économie, Christine Lagarde, et plus récemment l’ordre du Mérite décerné par Bruno Lemaire, deux moments forts qu’elle prit soin de partager avec l’ensemble de ses collaborateurs.
Chez Mäder, on travaille en famille depuis les débuts. Au président Antonio, le développement, à la directrice générale Corinne, les finances et l’export. Il va falloir aussi compter sur Julien – 29 ans – qui pilote l’innovation et la RSE, aux côtés de son père. Celui qui est docteur en chimie des polymères et diplômé de l’Edhec se positionne depuis qu’il a 5 ans ! À cette époque, dès la primaire, il annonce qu’il veut reprendre la boîte. Vœu qui pourrait bientôt se réaliser.