Les trois frères Galic qui dirigent Unseenlabs, lancée en 2015, comptent bien se faire une place dans l’espace, grâce à la surveillance du trafic maritime par nanosatellites. Leader européen du secteur, la startup rennaise ambitionne d’être l’un des grands acteurs du « New Space ».
Qui a dit que l’espace était réservé aux seuls Américains ? Oubliez un peu les médiatiques et redoutables Elon Musk et Jeff Bezos et découvrons Clément, Jonathan et Benjamin Galic, la trentaine, déjà bien installés dans l’univers du New Space, ces acteurs privés, très agiles, qui taillent des croupières aux agences gouvernementales. Segment sur lequel investit pourtant le géant Arianespace qui à la fi n de l’année dernière lançait le quatrième satellite du Breton, visant à améliorer la surveillance maritime.
Une fratrie à la conquête spatiale
L’histoire commence lorsque Jonathan Galic, un ancien de la branche satellites militaires d’Airbus Defence and Space (ADS), expert en renseignements électromagnétiques, et son frère Clément, passé par Atos et Capgemini, voient émerger des sociétés privées, presque toutes américaines, qui utilisent des microsatellites pour proposer des solutions commerciales à l’instar de « Spire », qui fait de la position par balises de bateaux.
Les deux frères se disent alors qu’il y a un créneau à prendre. « Ce domaine-là ne s’apprend pas à l’école. C’est un peu la chasse gardée de certains États », confie Clément Galic. Et d’ajouter : « L’idée c’était justement d’ouvrir cette technologie au monde du civil. »
Ils décident de se lancer avec leur propre technologie sur ce segment des nanosatellites de repérage, sortes de grosses boîtes à chaussures pesant une dizaine de kilos chacune. Les deux frères sont rejoints par le troisième, Benjamin, un avocat d’affaires spécialisé dans l’innovation, qui va les accompagner dans le conseil et le financement.
Naît alors Unseenlabs en 2015 à Rennes. Pourquoi la Bretagne ? « C’était à la fois une façon de rentrer à la maison, mais aussi de prévoir l’avenir. La Bretagne, et Rennes particulièrement, est un endroit où il y a beaucoup de hautes technologies notamment dans les télécoms, l’intelligence artificielle, et la cybersécurité. C’est donc un vivier de recrues potentielles pour nous », argumente Clément Galic son président, fier d’évoquer la Breizh Tech.
Déjouer les pirates
Le cœur de métier d’Unseenlabs est de déployer des satellites à 500 km au-dessus de la mer, qui ont la capacité de repérer des signaux électromagnétiques, avec un niveau de précision jamais atteint. Son point fort : localiser la totalité du trafic maritime, y compris les navires qui souhaitent rester discrets en coupant leur balise. Discrets pour déjouer l’attention des forces de sécurité, mais aussi pour la bonne cause, afin ne pas se faire repérer par des pirates, et dans ce cas, le Breton vient apporter ses services.
90 % des marchandises sont transportées par voie maritime, de nouvelles routes s’ouvrent et les navires pirates et les navires illégaux sont omniprésents. La jeune entreprise de 20 salariés compte parmi ses clients, armateurs, assurances, la Marine nationale, et d’autres polices des mers chargées de lutter contre la pêche illégale, le narcotrafic, et le dégazage par exemple.
L’environnement est au cœur de la stratégie d’Unseenlabs. « On parle souvent du dégazage, mais il faut savoir que la pêche illégale représente 20 % des captures mondiales », insiste le CEO. Le matériel utilisé est aussi conçu à cette fin.
« C’est le gouvernement français qui donne l’autorisation de ce qu’on envoie dans l’espace. Il faut donc prouver que nos satellites ne vont pas polluer l’orbite terrestre », précise Clément Galic.
Les trois frères se sont placés sur ce marché en hyper croissance que représentent les satellites aux usages à la fois nombreux et divers. Leur nombre mis en orbite a plus que doublé en un an.
Unseenlabs est sur tous les terrains. En novembre dernier, la ministre des Armées, Florence Parly, lançait Keraunos, une liaison de communication optique, à base de laser haut débit, entre un nanosatellite de 20 kg et une petite station sol sur Terre. Un projet notamment mené avec Unseenlabs.
Avec un cinquième satellite lancé en janvier, « l’objectif est de passer à plus de 20 en 2025 ». On n’arrête plus la fusée Unseenlabs.