Catégories

PME

Le pionnier français de la batterie propre

Réalisé par FABRICE LUNDY ET CAMILLE BOUR

Photos LIONEL GUERICOLAS

Le Grenoblois Verkor est en train de s’imposer comme le pionnier français de la batterie «propre». Un énorme enjeu!

BENOIT LEMAIGNAN :  cofondateur de Verkor

Le Vercors fut le lieu historique en 1944 de la Résistance que l’on connaît. Verkor, lui, est en train d’écrire une autre histoire, celle de l’automobile de demain.

C’est officiel depuis le mois de mai, on ne pourra plus acheter en 2035 de voitures neuves à moteur thermique dans toute l’Union européenne. La jeune pousse de Grenoble avait senti le vent tourner en 2020 en se lançant sous l’impulsion de ses six cofondateurs. « Nous visons un changement de régime de la même ampleur que lorsqu’on a retiré les chevaux des villes dans les années 20, explique Benoit Lemaignan, cofondateur et président du directoire, un ancien ingénieur aéro chez Airbus, passé ensuite par Carbon 4, la société de conseil de Jean-Marc Jancovici. La batterie électrique m’est apparue comme le prochain gros défi pour être transformant sur le plan des usages et sur le plan industriel. »

Verkor a une ambition claire : accroître la production de batteries
bas-carbone et faire de l’Europe un acteur clé : « Un véritable outil de souveraineté. D’autant que le continent dispose de tous les atouts nécessaires sur son territoire : les industries chimiques, électriques, minières et automobiles, sans oublier le potentiel humain», s’enthousiasme Benoit Lemaignan.

De grands volumes et des rendements élevés

Elle s’est trouvée dès le départ des actionnaires de premier plan* ainsi qu’un partenaire et futur client qui n’est autre que Renault qui lui achètera au départ les deux tiers de la production de la future gigafactory de Dunkerque. Benoit Lemaignan ne peut s’empêcher d’ailleurs de saluer « l’engagement de Lucade Meo, son président, pour localiser cette production en France et en Europe ».

L’entreprise grenobloise va produire des cellules de batteries électriques et les proposer à des prix accessibles. La batterie, c’est 40% de la valeur d’une voiture électrique.

« Nous avons une forte conviction, explique Benoit Lemaignan: celle d’être capable de produire de façon très digitale et très innovante pour obtenir de grands volumes et des rendements élevés. Nous avons construit toute l’équipe autour de ça avec tous les métiers aussi nombreux que divers, telles la papeterie, la chimie ou l’électromécanique. » Verkor ce sont actuellement 160 collaborateurs.

Concevoir des batteries propres, grâce à une énergie propre bas-carbone nucléaire non fossile et des métaux, tels le lithium ou le cobalt choisis selon une exigence environnementale forte, « c’est un point très important dans nos discussions avec Renault, rappelle le président de Verkor. On y travaille spécialement pour le nickel avec l’un de nos nouveaux actionnaires, le Sud-Africain Sibanye -Stillwater. » Une démarche vertueuse qui va jusqu’au recyclage quasiment au pied des usines pour faire de la boucle courte, sachant qu’une batterie a une durée de vie de vingt ans.

Une école de la batterie à Grenoble

Être proche des consommateurs sur un continent qui veut montrer l’exemple, c’est ce qui a conduit Verkor à planter son drapeau sur le Grand Port Maritime de Dunkerque (GPMD) à Bourbourg, là où sera installée sa gigafactory opérationnelle en 2025. C’est l’une des trois prévues dans la région avec celles du Chinois Envision à Douai, et d’ACC – StellantisTotal-Saft – à Douvrin dans le Pas-deCalais. La concertation préalable s’est tenue en juillet pour Verkor. Elle aura une capacité de production de 16 GWh de cellules par an afin d’équiper jusqu’à 300000 voitures, avant de tripler les volumes en 2030 avec 1million de batteries.
De là, elle fournira, entre autres, non loin, les usines de Renault à Dieppe et à Douai.

1 200 personnes travailleront sur place, venues de 30 pays différents. « On recrute mondialement mais 80% des embauches se feront localement, s’exclame son président. On monte une école de la batterie à Grenoble, un site de formation et de talents ! »

Trois gigafactories, ce ne sera pas un luxe pour répondre à la demande croissante du marché. Les experts estiment à un térawatt-heure (1 000 gigawatts-heures), la capacité de production en 2030. Ce qui ne refroidit pas le dirigeant de Verkor. «On n’a pas de retard et on sera le premier marché. »

La jeune entreprise compte lever 1,5 milliard d’euros pour son usine nordiste «une plateforme d’attractivité forte».
Une valorisation qui va la positionner désormais comme une nouvelle licorne française.

*EIT InnoEnergy (Commission européenne), Groupe IDEC, Schneider Electric, Capgemini, Renault Group, EQT Ventures, Arkema, Tokai COBEX et Demeter FMET.

Partager cet article
Partager cet article

Vous pouvez retrouver cet article dans la revue :

ECO KEYS #3

Commander sur Fnac Commander sur Amazon Commander sur Cultura

Temps de lecture : 3 mins