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Emballer sans polluer, un chantier Européen ambitieux mais incertain

Réalisé par Dorothée Blonde et Fabrice Lundy

Comment réduire, réemployer et recycler la masse des déchets d’emballages ? Au travers du règlement Proposal Packaging and Waste Regulation (PPWR), les députés européens souhaitent une refonte complète du marché des emballages grâce à des objectifs à fixer aux États membres. Un but ambitieux qui fait débat.

Avec 180 kg de déchets d’emballages par an et par Européen, le continent bat des records. Et si rien n’est entrepris, leur poids pourrait croître de 19 % d’ici à 2030 et pour ceux en plastique de presque 50 %. La moitié d’entre eux qui contaminent nos océans proviennent d’emballages à usage unique. Enquête sur l’impact de ce nouveau cadre commun qui inquiète les industriels. « Une montagne », voilà comment Hélène Pérennou décrit la nouvelle réglementation qui incite à abandonner les emballages à usage unique au profit de solutions plus durables. La secrétaire générale de Syndilait – l’organisation professionnelle regroupant la majorité des fabricants de laits de consommation liquide – estime être prise en effet entre deux feux. La particularité de l’industrie du lait en France c’est que 97 % du marché repose sur l’UHT – le lait traité à ultra haute température – qu’on retrouve en brique ou en bouteille plastique. « Le lait UHT pose des contraintes fortes sur l’emballage mais il permet de limiter les émissions de gaz à effet de serre sur la chaîne du froid. » Comprenez qu’interdire certaines catégories d’emballage pourrait entraîner de nouveaux désagréments, contradictoires avec l’ambition centrale du Pacte Vert, à savoir la réduction des émissions carbone.

Harmoniser le marché des emballages

La création d’un socle de réglementations commun aux États membres est une démarche partagée par bon nombre d’industriels mais à condition de trouver le bon équilibre. Selon Elipso, le syndicat des fabricants d’emballages en plastique, il est nécessaire d’assortir le règlement de critères précis quant aux capacités de collecte, de tri et de recyclage des emballages. Le syndicat déplore un manque de lisibilité déstabilisant pour les industriels, lié au durcissement de certaines dispositions nationales par rapport au cadre européen. C’est le cas de la France qui en 2020 adoptait la loi Agec, loi antigaspillage prévoyant la fin des emballages en plastique à usage unique d’ici à 2040. Environ 5,5 millions de tonnes d’emballages ménagers sont mises en marché chaque année en France dont 20 % en plastique, et la grande majorité à usage unique.

Recyclage versus réemploi

L’angoisse des professionnels réside aussi dans l’articulation entre recyclage et réemploi, qui consiste à mettre à disposition le produit dans un emballage réemployable destiné à être retourné par le consommateur pour être nettoyé, puis rempli à nouveau par le professionnel. Si 100 % des emballages de l’industrie du lait ont déjà une filière de recyclage opérationnelle, qu’en est-il de l’objectif de suppression du plastique à usage unique fixé à 2040 ? « Nous n’avons aucune option qui fonctionne parce qu’on fait du lait UHT stérile. On pourrait choisir le verre mais cela veut dire qu’il faudrait basculer tout le marché en lait pasteurisé », s’interroge la secrétaire générale de Syndilait. De nombreux secteurs déplorent une confusion qui va s’installer en passant du recyclable où ils ont déjà investi en masse, vers le réemploi à l’horizon 2040. Car si cette dernière mesure est confirmée, elle pourrait entraîner des perturbations importantes dans la chaîne d’approvisionnement, des coûts plus élevés pour les transporteurs et a fortiori pour les consommateurs. Les différentes fédérations industrielles tentent de démontrer qu’un emballage réutilisable n’est pas toujours plus bénéfique d’un point de vue environnemental qu’un produit à usage unique.

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