« Be at the table and not on the menu! » (« Soyez autour de la table et pas sur le menu »), une baseline bien connue en M&A qu’Elise Erbs, la directrice des investissements d’Electra fait sienne. Une formule qui rappelle qu’il faut avoir rapidement les moyens pour croître et éviter d’être absorbé en étant actif dans la consolidation à venir. Ce pourrait être aussi la devise de la jeune pousse, qui en à peine trois ans, s’est déjà imposée en Europe en installant presque 300 stations, soit 1 400 points de charge rapide pour véhicules, au Benelux, en Italie, en Espagne et bientôt, en Allemagne, en Suisse et en Autriche. L’objectif est d’en gérer dix fois plus d’ici à 2030 ! Une croissance remarquable partie en janvier 2022, à l’ouverture du premier point, à Aubervilliers au nord de Paris. Les trois associés, Aurélien de Meaux, Julien Belliato et Augustin Derville partent d’un postulat très simple : le besoin de déployer des recharges — rapides — en milieu urbain et périurbain, pour faire adopter les véhicules électriques. « Nous avons été un peu prescripteurs » dans un pays comme la France, qui souffre d’une qualité d’infrastructures assez médiocre.
Trouver les meilleurs emplacements
La force d’Electra repose sur plusieurs piliers. D’abord, posséder sa tech en interne, une particularité qu’Elise Erbs qualifie de « key factor of success ». L’entreprise a ainsi développé son propre système de réservation permettant une vraie fluidité dans l’expérience de recharge et de paiement, grâce à Park & Flash — un QR code placé sur la borne — ou via l’application sur laquelle on peut réserver la borne. « Tout cet écosystème infratech a vraiment été un game changer et un avantage compétitif. »
« J’avais envie de quelque chose de nouveau avec une notion de souveraineté énergétique et d’innovation dans la mobilité. »
L’autre point clé, c’est l’autonomie d’Electra pour trouver les plus belles localisations. Une équipe dédiée sélectionne les meilleurs lieux et part convaincre les propriétaires fonciers de l’intérêt d’avoir sur place une borne : l’obtention de revenus, car « si on vend notre électricité, nous louons nos emplacements » et aussi l’apport de services pratiques aux visiteurs qui seront commercialisés. C’est ce qui a séduit les parkings Indigo, les autoroutes VINCI, des distributeurs tels Intermarché ou des chaînes hôtelières comme Kyriad ou Campanile. Bien que très jeune, la jeune entreprise connaît d’excellents taux de succès de charge et d’utilisation, au-dessus de la moyenne du marché. Avec quasiment 100 % de disponibilité et un temps de charge de 15-20 minutes, la promesse de recharge ultra rapide est tenue. « D’ailleurs, on ne se considère plus comme une start-up, mais comme une scale-up, se réjouit sa directrice des investissements qui se souvient qu’après quinze ans d’immobilier dans des banques d’affaires et des fonds de Private Equity, elle a rejoint l’équipe dès les premiers balbutiements d’Electra. J’avais envie de quelque chose de nouveau avec une notion de souveraineté énergétique et d’innovation dans la mobilité. Je restais d’ailleurs dans un environnement assez proche du mien. »
Des fonds d’infrastructures derrière Electra
Une équipe qui croit dur comme fer à son projet : « On avait la bonne tech, toutes les compétences humaines, avec un track record solide. » Une levée de fonds est lancée fin 2021. Les premiers partenaires financiers se font vite connaître : Ademe Investissement, la Banque des territoires, la Caisse des Dépôts, Eurazeo ou Rive, de nombreux fonds d’infrastructures qui ont des ressources plus grandes que ceux de capital-risque et qui savent patienter — les travaux sont parfois longs pour installer une station — avant d’espérer trouver de la rentabilité. La jeune entreprise compte également SNCF, RATP, et Allianz à son capital. Les dirigeants d’Electra se souviendront de 2023 comme d’un bon cru : d’abord une levée de fonds record de plus de 300 M€, ensuite l’intégration dans le label d’excellence French Tech Next 40, un programme d’accompagnement de l’État dédié aux 120 start-up françaises les plus performantes, en capacité de devenir leaders de rang international. La consécration. Car intégrer ce label c’est avoir une forte visibilité. « Savoir faire c’est bien, mais faire savoir c’est bien aussi ! », lance la directrice des investissements. C’est aussi une façon d’accélérer le développement du réseau en France et à l’international en partageant les expériences entre scale-up et start-up. « Le monde de la tech est passionnant, il y a plein d’outils, on décuple son efficience. »